dimanche 27 novembre 2011

Manuel du parfait séparatiste : comment mener une opération sous faux drapeau?

"Plus tard, un ami à moi dont le nom sera toujours gardé secret, m'avoua que c'était lui qui avait posé cette petite bombe devant cette porte, pour créer une atmosphère de tension afin que les gens sachent que les Chypriotes turcs comptaient."

Un peu d'histoire.

1958 : Chypre n'est pas encore indépendante; elle est peuplée majoritairement de Grecs (80%) sur tout le territoire. Les Chypriotes grecs de l'EOKA combattent les forces britanniques par des attentats. Réponse classique de la part des forces de sa très gracieuse majesté, comme dans tout conflit colonial ou d'occupation : répression, torture et camps d'internement (comme le "camp K", à Kokkinitrimithia, ci-dessous).


Les Britanniques créent une police spéciale composée de Chypriotes turcs pour lutter contre les manifestations favorables à l'EOKA. Diviser pour régner, là-aussi c'est une stratégie classique.

Le 7 juin 1958 une bombe explose devant la porte du bureau d'information du Consulat turc à Nicosie. Immédiatement l'EOKA est montrée du doigt, et accusée de vouloir aussi s'en prendre aux civils chypriotes turcs.

La foule turque s'en prend alors aux Grecs du quartier turc de Nicosie (violences, pillages, ailleurs on appelle cela un pogrom mais à Chypre on n'écrit pas l'histoire comme ailleurs) et les oblige à se déplacer vers les quartiers grecs. S'en suivront de graves violences entre les deux communautés, les premières depuis le soulèvement grec de l'EOKA, qui n'avait touché que les Britanniques et leurs collaborateurs.

En cliquant sur ce lien vous serez redirigé vers un extrait du documentaire britannique "Britain's Grim Legacy", produit pas la chaîne ITV en 1984.

Où Rauf Denktash, leader chypriote turc, reconnaît que c'est un de ses amis qui a posé la bombe...

Ce genre de détails est rarement repris par les copier-coller de sites de propagande qui fleurissent sur Internet ou les brochures de propagande distribuées dans les hôtels de la zone occupée.


"Plus tard, un ami à moi dont le nom sera toujours gardé secret, m'avoua que c'était lui qui avait posé cette petite bombe devant cette porte, pour créer une atmosphère de tension afin que les gens sachent que les Chypriotes turcs comptaient."

Le 12 juin 1958, 35 ouvriers Chypriotes grecs seront lâchés dans le village chypriote turc de Kioneli (la chercheuse chypriote grecque Fanoula Argyrou, affirme que cela se fit avec la complicité des Britanniques); huit seront tués par une foule de 200 personnes menée par les unités spéciales turques qui constitueront ensuite la TMT (organisation paramilitaire séparatiste armée et entraînée par des officiers turcs). De nombreux autres seront gravement blessés.

Certaines images des victimes, diffusées par la presse, comme celle-ci, diffusée par le journal communiste Charavghi, creuseront davantage le fossé.


Naturellement le Royaume-Uni et la Turquie présenteront alors le conflit chypriote, non pas comme un conflit colonial ou d'occupation, mais comme un conflit entre Chypriotes grecs et Chypriotes turcs. Un simple conflit communautaire soi-disant déclenché par des violences de l'EOKA contre des Chypriotes turcs, et justifiant que la Turquie intervienne à la table des négociations, et que le Royaume-Uni se présente comme force d'interposition...

C'est une des raisons pour laquelle Chypre ne put obtenir une vraie indépendance (à défaut de l'union à la Grèce souhaitée par la majorité), mais une indépendance assortie de "puissances garantes", dont la Turquie et le Royaume-Uni, de "quotas" inapplicables que l'on pourrait qualifier de "discrimination positive renforcée" (puissance 10) avant l'heure, d'un droit de veto du vice-président (qui devait obligatoirement être chypriote turc) sur toutes les décisions, et autres curiosités juridiques qui font de sa constitution de 1960 un modèle aberrant.

Après l'indépendance de 1960, la TMT se maintiendra intacte et fera de nouveau parler d'elle en 1963-1964, en luttant ouvertement contre les forces gouvernementales. Là aussi la mèche sera allumée d'une curieuse façon. Mais nous en reparlerons.

Inutile de dire, évidemment, que c'est toujours le vainqueur qui écrit l'histoire (sauf peut-être, quand le conflit perd de son actualité, ou qu'il n'a plus rien à revendiquer ou à défendre). A Chypre plus qu'ailleurs, puisque les Chypriotes sont totalement incapables de faire connaître leur version des faits dans ce domaine.

C'est la version turque qui domine dans les média, sur Internet, et dans un certain nombre de publications, au moins pour toute la période antérieure à l'invasion de 1974. Elle est devenue la doxa et personne ne s'en rend plus compte.

Alors de temps en temps, autant rappeler tout ce que le vaincu pourrait, lui aussi, faire valoir, même si cela ne sert pas à grand chose.

mercredi 23 novembre 2011

Pour le président turc, Chypre est un demi-pays qui présidera une « Union misérable. »

















En cette fin de mois de novembre 2011, le Président Abdullah Gül a été reçu en grandes pompes par la Reine d'Angleterre et le premier ministre britannique.

Concernant le fait que Chypre prendra la présidence tournante de l'Union européenne en juillet 2012, le Président turc a parlé d'un « demi-pays » qui dirigerait « une union misérable »:

"Ce demi-pays, ce pays incomplet prendra la présidence de l'union européenne ». « Ce sera une demi-présidence conduisant à une union misérable. C'est exactement l'expression que j'ai utilisée en parlant avec les leaders de l'Union européenne." ("Now this half a country, this incomplete country will take over the EU presidency," Gul was quoted as saying by Aksam newspaper. "There will be a half-presidency leading a miserable union. That is exactly the expression I said to EU leaders.")

Ce mépris peu dissimulé du Président turc pour la République de Chypre n'a rien d'étonnant : la Turquie ne reconnaît pas la République de Chypre.

Plus étonnant, le silence de la presse européenne, et française notamment...



Source : Reuters via Jerusalem Post, presse turque

+:

Lien permanent de l'article

Retour au blog Actu Chypre, l'actualité du conflit de Chypre : http://actuchypre.blogspot.com/


Ou : consulter la liste de tous les articles du blog récents et plus anciens, colonne de droite

jeudi 17 novembre 2011

100.000 Chypriotes turcs ont demandé le passeport de la République de Chypre













Selon un article du journal turc Milliyet du 6 octobre 2011, 100.000 Chypriotes turcs auraient demandé un passeport chypriote aux autorités de la République de Chypre, à ce jour.

C'est tout à fait remarquable si l'on songe aux efforts menés par la Turquie et par la "RTCN", l'entité séparatiste du nord, reconnue par la seule Turquie, pour empêcher les Chypriotes turcs de "ré-adhérer" à la République de Chypre après plus de 50 ans de politique séparatiste, couronnée de "succès" en 1974...

De façon incontestable, c'est l'appartenance de Chypre à l'Union européenne qui à l'origine de ce mouvement; et le fait que les Chypriotes turcs vivant en zone occupée, se déplacent de plus en plus dans la zone toujours contrôlée par le gouvernement chypriote, pour profiter des hôpitaux, du marché du travail, etc.

Et pourtant...

A l'heure où nous écrivons, les négociations se poursuivent sous l'égide de l'ONU entre:
- d'une part, le président de la République de Chypre, honteusement réduit au rang de représentant de la communauté chypriote grecque alors que 100.000 Chypriotes turcs ont fait acte de re-adhésion à la République de Chypre après des décennies de séparatisme;
- et d'autre part un "président" d'une "république" créée par la Turquie au nord, peuplée majoritairement de Turcs de Turquie, un "président" que l'on continue pourtant à présenter comme celui des Chypriotes turcs. Ce qui n'a plus aucun sens compte tenu de l'évolution démographique du nord.

Du point de vue des représentations politiques, l'ONU a décidé de figer le temps...

Dans ce blog, nous avons rappelé à plusieurs reprises que juridiquement, la République de Chypre était le seul état habilité à représenter les Chypriotes dans leur ensemble.


Maintenant, rêvons un peu.

A notre sens l'entrée dans l'Union européenne, et le fait que le nord de Chypre est majoritairement peuplé de colons venus d'Anatolie depuis 1974, justifieraient de revoir totalement la donne, de revoir totalement les bases d'une solution politique à Chypre: grâce à une forte implication de l'union européenne, l'on pourrait envisager une résolution du conflit basée sur la seule entité juridiquement existante (la République de Chypre) plutôt que sur un séparatisme déguisé en "confédération" type "Plan ANNAN" (voir notre article sur le plan ANNAN).

Ce mouvement des Chypriotes turcs vers la République de Chypre ne fait que confirmer que cette possibilité existe, pour peu que l'Union européenne mette la pression en ce sens.

L'Union européenne pourrait jouer un rôle moteur en proposant d'abord d'administrer certaines zones, puis la totalité du nord. Les Chypriotes grecs pourraient reprendre possession de leurs propriétés au nord, le tout sous l'égide de l'Union européenne; celle-ci pourrait oeuvrer en ce sens pendant une très longue période transitoire, voire de façon permanente, tout en respectant le fait que juridiquement c'est tout le territoire chypriote qui relève normalement de la République de Chypre.

Il pourrait être possible de commencer par la ville inhabitée de Famagouste, où ne se pose pas la question de la colonisation turque (la ville est déserte depuis 1974). Point d'obstacle "technique" au retour des réfugiés chypriotes grecs, grâce à cette particularité. Et même sans envisager un règlement total du conflit par ce biais, il n'existe aucun obstacle "technique" à ce qu'au moins la question de Famagouste soit réglée. A ce que l'Union européenne gère cette ville pour permettre le retour des réfugiés et la rendre au contrôle de la République de Chypre. Aucun, sinon l'absence totale de volonté politique de l'union européenne.


Douces rêveries aujourd'hui, tous les acteurs du conflit, y compris l'ONU, en étant restés à des conceptions totalement dépassées par les événements.





Voir quelques-uns de nos articles à ce sujet :
Sur l'inaction de la présidence hollandaise de l'union au sujet de Famagouste en 2005:
http://actuchypre.blogspot.com/2005_12_01_archive.html
Sur les questions similaires :
http://actuchypre.blogspot.com/2005/12/citoyennet-chypriote-des-enfants-de.html
http://actuchypre.blogspot.com/2006/12/quand-la-turquie-fait-de-la-com-en.html


+:

Lien permanent de l'article

retour au blog Actu Chypre, l'actualité du conflit de Chypre : http://actuchypre.blogspot.com/


consulter la liste de tous les articles du blog récents et plus anciens, colonne de droite

Crise des hydrocarbures, crise du gaz: la Grèce, affaiblie, apporte son soutien à Chypre















Le nouveau ministre de la défense grec, Dimitris Avramopoulos, a tenu à effectuer son premier voyage à Chypre, dans une période troublée par la crise des hydrocarbures qui a éclaté entre Nicosie et Ankara. Il a réaffirmé, le 17 novembre 2011, que la Grèce était garante de l'indépendance de Chypre.

Chypre et la Grèce espèrent beaucoup de l'exploitation de leur sous-sol marin, et se sont rapprochées de Jérusalem dans l'espoir de former un axe géopolitique nouveau.

Toujours à propos des hydrocarbures, et cette fois en Grèce, la presse s'est faite l'écho des discussions ayant eu lieu au Parlement entre le nouveau vice-ministre de l'environnement Yiannis Maniatis et le député Panos Panayiotopoulos le 16 novembre 2011. Selon ce député de la Nouvelle Démocratie (droite), les premières informations sur les recherches d'hydrocarbures au Sud de la Crète feraient état de gisements encore plus importants que ceux découverts dans le champ chypriote "Aphrodite" (n°12). Et ce d'autant plus que les recherches de la compagnie Noble Energy auraient révélé que le gisement chypriote n'est pas exploitable dans sa totalité.

Mer ionienne, sud de la Crète... Il est manifeste que pour l'instant, la Grèce évite les recherches en mer Egée et à l'Est de la Crète et que la politique turque à cet égard est donc payante. Mais les Grecs pourraient évoluer : "nécéssité fait loi", et ces ressources éventuelles seront de plus en plus indispensables à la Grèce. On voit en tout cas où la politique de "rapprochement" (en réalité, de reculades) a mené la Grèce : à ne pas tenter d'exploiter ses rares ressources naturelles.

L'exploitation des hydrocarbures a même été évoquée par le nouveau premier ministre grec Loukas Papadimos lors de son premier discours en cette qualité au parlement grec.

L'intérêt des grandes entreprises pétrolières et des grandes puissances pour la Méditerranée orientale risque en tout cas d'aller grandissant...

C'est une véritable partie d'échecs qui se dessine. De son côté, la Shell (anglo-hollandaise) se serait rapprochée du gouvernement turc.

Le 16 novembre 2011, deux appareils de reconnaissance turcs RF-4E survolaient l'île grecque de Kastellorizo à seulement 300 mètres d'altitude, afin de photographier l'aéroport. L'armée de l'air turque a envoyé là un message symbolique fort, puisqu'il n'y avait aucune nécessité technique, pour elle, à s'approcher aussi bas, même avec des appareils de reconnaissance... La Turquie ne plaisante pas avec ce qu'elle considère comme son intérêt national.






Source : presse grecque
Entre autres :
http://www.dimokratiki.gr/article.asp?articleID=13399&catID=18&pubID=1
http://www.naftemporiki.gr/video/video.asp?id=44489&s=0
http://www.naftemporiki.gr/news/cstory.asp?id=2093364 (photo)
http://www.neakriti.gr/?page=newsdetail&DocID=867069&srv=86


+:

Lien permanent de l'article

retour au blog Actu Chypre, l'actualité du conflit de Chypre : http://actuchypre.blogspot.com/


consulter la liste de tous les articles du blog récents et plus anciens, colonne de droite

lundi 3 octobre 2011

Les zones économiques exclusives (ZEE) de la Grèce et de Chypre




En bleu celle de Chypre, juste à sa gauche celle de la Grèce selon le droit international, immense qui couvre l'essentiel de la partie orientale du bassin méditerranéen.

Sur cette carte la Turquie apparaît, en tout cas en Egée et en Méditerranée, comme une puissance essentiellement continentale malgré l'étendue de ses cotes (la Turquie compense largement cela avec une ZEE occupant la moitié de la mer noire).

La mer apparaît comme une ressource vitale pour les territoires naturellement pauvres, arides et peu étendus de la Grèce et de Chypre.

Le conflit gréco-turc apparaît aujourd'hui comme le miroir de la lutte récurrente des puissances continentales organisées en bloc, contre les puissances maritimes organisées en réseau.


Les petites îles et ilots sont d'une très grande importance, contrairement à ce que laissent parfois suggérer les analyses superficielles de certains pseudo-spécialistes qui ne comprennent pas pourquoi Grèce et Turquie semblent si attachées à quelques îles à chèvres (voir par exemple notre billet précédent et l'activité autour des ilots voisins de Samothrace http://actuchypre.blogspot.com/2011/09/hausse-des-tensions-dans-le-ciel-de-la.html)...

Ainsi la petite île grecque de Kastelorizo située à 200km à l'Est de Rhodes et à 1 km de la Turquie permet à la Grèce de doubler sa zone économique exclusive dans la partie située à l'Est de la Crète et permettrait à la zone économique exclusive grecque de rejoindre celle de Chypre.

Il faut noter cependant qu'à l'inverse de Chypre qui fixa sa zone économique exclusive sous l'impulsion de feu le Président Papadopoulos, les gouvernements grecs n'ont pas encore osé fixer par loi ou décret la zone économique exclusive de la Grèce par peur des réactions turques, de même qu'ils n'ont pas osé décréter officiellement l'étendue des eaux maritimes grecques à 12 miles nautiques comme cela serait son droit (et à mi-chemin lorsque cela n'est pas possible). Pourtant le droit international permettrait à la Grèce de le faire sans aucun doute possible. Force est de constater que cette attitude effrayée encourage la Turquie plutôt qu'elle ne la décourage et que les hommes politiques grecs contemporains sont de peu d'envergure comparés à leurs homologues turcs.

A ce propos Erdogan a réaffirmé, le 27 septembre 2011 lors de l'inauguration de la corvette furtive Heybeliada (programme Milgem, de fabrication turque), les ambitions turques en matière maritime indiquant que les intérêts turcs s'étendaient jusqu'à l'Océan indien et plaidant pour une autarcie turque en matière de production d'armement militaire (http://www.aksam.com.tr/dunyada-10-ulke-arasina-girdik--69815h.html).

Au cours de ce même discours il a glorifié la victoire ottomane de Prévéza contre... la flotte hispano-vétinienne de la Sainte-Ligue. Un message aux occidentaux?



retour au blog Actu Chypre, l'actualité du conflit de Chypre : http://actuchypre.blogspot.com/

consulter la liste de tous les articles du blog récents et plus anciens, colonne de droite

mercredi 28 septembre 2011

Hausse des tensions dans le ciel de la mer Egée et dans la zone économique exclusive de Chypre




Dans le ciel de la mer Egée


Le 28 septembre 2011 dans le centre et le nord de la mer Egée, l'aviation turque a tenté d'intercepter des appareils de l'armée de l'air grecque pour les empêcher de participer à l'exercice « poitrail d'acier » organisé par l'armée grecque (dépêche du groupe de presse grec Defencenet Media 28-09-2011 19:04:39, diffusée sur le site http://www.defencenet.gr/).

Douze appareils turcs dont huit armés ont décollé de la base de Balikesir et ont tenté d'aligner dans leurs viseurs les appareils grecs à portée de leurs missiles AIM-120 et les obliger ainsi à se détourner de leur route.

Les pilotes grecs ont pu se dégager et se retrouver derrière les appareils turcs, puis ont décroché à cours de carburant. Les appareils grecs sont des F-16 des escadrons 341 M et 330 M et un mirage 2000-5 de l'escadron 331 M.

Dans le passé ce type d'incidents a déjà conduit à la mort de pilotes des deux camps (dans le silence total de la presse européenne, même spécialisée).

Ce type d'engagements, est très courant entre les deux armées de l'air depuis les années 1980 mais était en diminution depuis quelques mois. Habituellement les pilotes tentent de « s'abattre virtuellement » sans jamais tirer leurs missiles (les deux pays sont encore membres de l'OTAN...), mais au risque de se crasher en mer au cours de ces « dog fights » où chacun tente de se retrouver derrière l'appareil adverse.

Les Turcs contestent l'espace maritime et aérien grec au large des îles grecques et ont toujours maintenu une certaine pression dans les airs, ces combats virtuels tournant cependant souvent à l'avantage des Grecs.

La nouveauté est que cette fois-ci le but des appareils turcs n'était pas seulement de manifester leur présence dans l'espace aérien grec, mais d'empêcher un exercice et de perturber le plan de vol des appareils grecs qu'ils connaissaient manifestement à l'avance. Autre nouveauté, les Turcs ont préféré engager à longue distance avec le système de missiles AIM-120 pour tenter d'éviter le combat rapproché.

Cet incident intervient au moment où les Turcs essaient, en vain, d'empêcher le gouvernement chypriote de continuer ses recherches de gaz dans le Sud-est de la zone économique exclusive chypriote. Et au moment où ils mandatent la navire italien R/V Urania pour effectuer des recherches en Mer Egée, non loin de l'île grecque de Samothrace et de l'îlot grec de Zourafa (également appelé Ladoksera) où l'on soupçonne la présence de pétrole (même source dépêche du 28-09-2011 à 01:37:33 ).


A Chypre


Le navire de recherches turc Piri Reis avait atteint, le 27/09/2011, le champ de gaz n°12 situé au sud-est de Chypre accompagné d'une frégate et d'une corvette de la marine de guerre turque, tandis que 6 avions de chasse turc F-16 ont volé à 50 miles à l'Ouest de la ville chypriote de Paphos avec plusieurs hélicoptères, et plus à l'est avec deux chasseurs et quatre hélicoptères au large du Cap Greco (source journal chypriote modéré Phileleftheros - édition internet 27/09/2011- et groupe de presse grec Defencenet Media- (dépêches du 27/09/2011 à 16h43).


Selon les mêmes sources, se trouveraient dans la région, pour surveiller les mouvements turcs, des navires Israéliens, et, à la limite entre la zone économique exclusive (ZEE) chypriote et la ZEE israélienne, un avion radar israélien G550 Nahshon-Eitam ainsi que 10 hélicoptères et 2 chasseurs (les Israéliens étant du côté des chypriotes dans cette affaire), des navires et aéronefs américains et britanniques, ainsi qu'un sous-marin russe selon certaines sources. Des avions de patrouille maritime américains P-3 Orion patrouillent autour des recherches de la société américaine Noble Energy (seule habilitée par le gouvernement chypriote à effectuer les recherches), environ 3 à 5 heures par jour.

Le Piri Reis est ancien et n'a pas les moyens d'effectuer de véritables recherches contrairement aux navires norvégiens que la Turquie a dépêchés plus au nord (voir notre précédent article). Il constitue pour la Turquie un moyen d'occuper le terrain.

Le vrai défi pour Chypre et pour l'Europe viendra lorsque la Turquie commencera à exploiter illégalement le gaz ou le pétrole chypriote, si elle le fait ce que rien ne permet d'exclure compte tenu de la montée en puissance turque.


MISE A JOUR DU 30/09/2011 - Position d'Israël :

Selon la presse israélienne, deux appareils F-15 israéliens ont survolé le Piri Reis ce qui a entraîné l'apparition de l'armée de l'air turque. (Jerusalem Post, Israeli jets fly over Turkish gas exploration ship by JPOST.COM STAFF 09/30/2011 http://www.jpost.com/Headlines/Article.aspx?id=240023) (à propos des relations gréco-israéliennes voir notre billet : http://actuchypre.blogspot.com/2011/09/actuchypre-revient.html)
Démenti de l'Etat-major turc : http://www.jpost.com/International/Article.aspx?id=240051




consulter la liste de tous les articles du blog récents et plus anciens, colonne de droite

dimanche 25 septembre 2011

La Turquie envoie sa marine de guerre à Chypre : intimidations et pillage d'état.





Un point complet sur la crise des hydrocarbures entre Chypre et la Turquie.



La Turquie a envoyé plusieurs frégates et patrouilleurs à Chypre, y compris au large des cotes du sud de l'île. Ce qui confirme notre précédent billet (http://actuchypre.blogspot.com/2011/09/la-turquie-menace-chypre.html).

Selon le journal turc Aksam (édition internet du 23 septembre 2011 http://www.aksam.com.tr/firkateynler-akdenize-acildi--68953h.html), trois frégates turques (Salih Reis, Sokullu Mehmet Pasa et Oncu) ont appareillé pour Chypre. Le journal turc annonce qu'une de ces frégates sera visible depuis le port chypriote de Paphos situé au Sud-Ouest de Chypre tandis que les deux autres patrouilleront dans la zone. Trois sous-marins se dirigeraient également vers Chypre. (une source en anglais : http://www.cyprus-mail.com/cyprus/turkish-oil-exploration-ship-sets-out-contest-cyprus-drill-rights/20110924)

Par ailleurs la Turquie s'est autorisée le 21 septembre 2011 à explorer les fonds chypriotes aussi bien au nord qu'au sud.

Elle a en effet signé un accord en ce sens... avec elle-même (plus précisément avec la "République turque ce Chyrpe nord", créée et reconnue par la Turquie dans la zone qu'elle occupe militairement à Chypre, peuplée en majorité des colons d'Anatolie installés là depuis 1974).(une source en français : http://www.lefigaro.fr/international/2011/09/22/01003-20110922ARTFIG00754-la-turquie-et-chypreengagent-la-guerre-du-gaz.php)

Autrement dit, un pillage d'état en règle.

Les Turcs ayant menacé d'envoyer leurs navires à 6 miles nautiques au sud de Paphos (Sud-ouest de l'île), le gouvernement chypriote a déployé des missiles anti-navires Exocet (source Defencenet Media).

La Turquie a également envoyé des avions de chasse F-16 dans la zone (source article du figaro sus-visé).

Chypre n'a pratiquement ni marine ni aviation et n'a donc pas les moyens de faire face à la marine turque. Elle ne peut compter que sur une hypothétique aide de la Grèce ou des Israéliens avec lesquels les liens de Chypre se sont récemment renforcés - pour permettre aux Chypriotes et à Israël d'exploiter de manière concertée les ressources se situant dans leurs zones économiques exclusives, qu'elles ont délimitées au grand damne des Turcs pour lesquels la République de Chypre n'existe pas.

Les Etats-Unis ont intérêt à ce que la République de Chypre ne soit pas inquiétée dans l'exploitation de ses ressources, puisque les forages ont été confiés à la société américaine Noble Energy. Cette société a déclaré qu'elle n'était pas effrayée par les intimidations turques (une source en anglais 'http://www.globes.co.il/serveen/globes/docview.asp?did=1000680741&fid=1725). L'intérêt des USA devrait réduire cette démonstration turque au simple rang de provocation.

Mais les USA d'Obama ne semblent pas prêts à mettre fin à la montée en puissance turque qui déséquilibre la région, puisqu'ils auraient autorisé la vente à la Turquie de drones predator (une source turque en anglais: http://www.worldbulletin.net/?aType=haber&ArticleID=79338)

La Turquie a par ailleurs engagé les services d'une société norvégienne de prospection dont deux navires sont déjà au large de Chypre. Elle a également dépêché un de ses navires, le Piri Reis.

La marine turque a également effectué des exercices au sud de Limassol, empêchant la circulation maritime du plus grand port de Chypre; des hélicoptères turcs se sont approchés de l'hélicoptère de la compagnie américaine Noble Energy et des F-16 turc ont gêné le décollage d'un avion civil de la compagnie Cyprus Airways qui s'envolait depuis l'aéroport de Larnaca (sources en anglais http://www.cyprus-mail.com/cyprus/turk-naval-exercises-real-danger-region/20110923, en grec http://www.kathimerini.com.cy/index.php?pageaction=kat&modid=1&artid=58904

L'Union européenne a appelé Ankara à la retenue mais pour l'instant, aucune riposte énergique de la part des grandsd dirigeants européens pour ne pas froisser la Turquie, partenaire commercial où nombre d'entreprises européennes ont délocalisé leur production.

"En ce qui concerne les forages pétroliers, nous avons, d'une manière générale, dit que nous appelions la Turquie à s'abstenir de toute sorte de menaces, ou sources de frictions, ou d'actions qui pourraient affecter de manière négative" ses liens avec Chypre, a déclaré un porte-parole du « chef de la diplomatie » européenne Catherine Ashton (source AFP).

La Turquie a menacé de dresser une « liste noire » des sociétés qui coopéreraient avec le gouvernement chypriote (qu'elle ne reconnaît pas) – source en anglais http://ekathimerini.com/4dcgi/_w_articles_wsite1_7_22/09/2011_407543.

Cela pourrait inquiéter des sociétés françaises comme Total qui se sont montrées intéressées par l'exploitation des hydrocarbures chypriotes (source en grec http://www.sigmalive.com/inbusiness/news/financials/419896).

C'est le plus grave incident à Chypre depuis 1996 (et le meurtre des Chypriotes grecs Tassos Isaak – photo ci-dessous - et Solomos Solomou en août 1996 par les "forces de sécurité" turques et des membres de l'organisation des "loups gris", sous les yeux impuissants de l'ONU).


Enfin le président communiste de Chypre Dimitris Christofias a annoncé qu'il ferait en sorte que l'exploitation des hydrocarbures profite aussi à la minorité chypriote turque. Le minorité chypriote turque ayant été démographiquement submergée par les colons de Turquie et la majorité de ses leaders ne reconnaissant pas la République de Chypre, cela représente une concession unilatérale et sans contrepartie de plus de la part de Dimitris Christofias.... (source en anglais http://www.cyprus-mail.com/cyprus/gas-spoils-be-shared-settlement/20110923)


(Nous n'indiquons pas toutes nos sources, uniquement les plus facilement accessibles pour un lecteur francophone ou anglophone)


retour au blog Actu Chypre, l'actualité du conflit de Chypre : http://actuchypre.blogspot.com/



consulter la liste de tous les articles du blog récents et plus anciens, colonne de droite

mercredi 7 septembre 2011

La Turquie menace Chypre.

















Le ministre turc des affaires européennes menace d'envoyer la flotte turque pour stopper les recherches de gaz et de pétrole de Chypre en Méditerranée, dans une interview au journal turc Zaman.

A noter que la Turquie ne reconnaît pas le droit de Chypre à posséder une zone économique exclusive car elle ne reconnaît pas l'existence légale de la République de Chypre, pourtant membre de l'union européenne.

Extraits :

Question

- "Greek Cyprus has declared that it will begin oil exploration in the Mediterranean on Oct. 1. Can you comment on this?"

- "Chypre grecque" * a déclaré qu'ils commenceront les recherches de pétrole en Métiterranée le 1er octobre. Pouvez-vous commenter cela? [*note de traduction : cette façon de désigner Chypre s'explique par le fait que les Turcs ne reconnaissent pas que le territoire chypriote appartient juridiquement dans sa totalité à la République de Chypre, ce qui reviendrait à reconnaître qu'ils occupent le nord; ils n'emploient donc jamais le terme "Chypre" seul]

Réponse :

- The kinds of things that have happened in the past [Turkish naval interference with exploration] whenever the Greek Cypriots have made such attempts may well happen again. That is how serious Turkey is. Doing this in waters where they have no jurisdiction is illegal. Turkey will rely on international law to pursue its rights to the fullest extent.

- Le genre de choses qui ont eu lieu dans le passé chaque fois que les Chypriotes grecs ont fait ce genre de tentatives se reproduira. La Turquie est aussi sérieuse que cela. Faire cela dans des eaux qui ne sont pas sous leur juridiction est illégal. La Turquie s'appuiera sur le droit international pour faire valoir ses droits à leur maximum.


Question :
- Will the navy send a fleet?
- La marine enverra-t-elle une flotte?

Réponse :
- This is what we have the navy for. We have trained our marines for this; we have equipped the navy for this. All options are on the table; anything can be done.
- c'est pour cela que nous avons notre parine. Nous avons entraîné nos marines pour cela; nous avons équipé notre marine pour cela. Toutes les options sont sur la table; tout est possible.

(à noter que le journal Zaman dans son édition en anglais a ajouté que le ministre menaçait d'envoyer la flotte si les Chypriotes grecs "entraient dans les eaux turques"; cet ajout a été fait pas le journal et n'existe pas dans la version turque de l'article ni dans l'interview même dans sa version anglaise: le ministre ne distingue donc pas selon le lieu où seront faites ces recherches et d'ailleurs les Chypriotes n'ont bien évidemment jamais eu l'intention de faire des recherches dans les eaux turques : les recherches doivent être faites par la société américaine Nobel Energy au Sud-est de Chypre, entre Chypre et Israël - en bas à droite sur la carte ci-dessus - donc bien loin de la Turquie, dans la zone économique exclusive de Chypre, que la Turquie ne reconnaît pas...)


Dans la même interview le ministre a confirmé que la Turquie gélera ses relations européennes pendant la présidence tournante chypriote de l'union. Il a également regretté le climat selon lui "islamophobe" qui prévaudrait en Europe.

http://www.todayszaman.com/news-255674-turkish-minister-warns-greek-cypriots-about-oil-exploration-in-mediterranean.html

retour au blog Actu Chypre, l'actualité du conflit de Chypre : http://actuchypre.blogspot.com/


consulter la liste de tous les articles du blog récents et plus anciens, colonne de droite

"Actuchypre" revient.


Depuis un an et demi le blog "actuchypre" n'était plus alimenté.

Au cours de cette très longue pause, nous avons pris un peu de recul.

Nous avons décidé d'insister sur le côté "revue de presse", que nous n'alimenterons qu'en cas d'évolution significative, dans le souci de toujours percevoir la forêt, plutôt que le doigt.

Mais d'abord, un long message pour répondre à la question qui s'impose : que dire de la situation à Chypre depuis notre dernière note sur ce blog?











Chacun a pu observer la politique des concessions sans contrepartie du gouvernement chypriote de Dimitris Christophias, qui n'a fait qu'encourager l'inflexibilité du négociateur turc.

Ce n'est pas vraiment nouveau, puisque c'était en réalité la politique permanente des gouvernements chypriotes, jusqu'à la parenthèse du rejet, par les électeurs chypriotes, du calamiteux plan Annan (que si peu de gens ont lu ou compris en Europe, nous ne le dirons jamais assez).












Ce qui est nouveau c'est que sur le plan politique, la Turquie a définitivement, semble-t-il, renoué avec son passé : les forces de la tradition et de la bourgeoisie de province ont confirmé qu'elles avaient pris le pouvoir au détriment des kémalistes, et que quelque chose avait vraiment changé en Turquie.

Les arrestations de nombreux généraux impliqués dans le plan de coup d'Etat contre le premier ministre Erdogan se sont multipliées. La constitution a été modifiée. Nous ne détaillerons pas ces points ici; avec Internet, chacun pourra les retrouver et la Turquie n'est pas le sujet principal de ce blog.

Mais force est de constater que la vraie Turquie, finalement, a renoué avec ses penchants naturels : le rapprochement avec les autres pays musulmans s'est confirmé. Conduisant à une brouille avec Israël.

La Turquie veut voguer vers son propre destin de super-puissance régionale, lorgnant à la fois vers le monde arabo-musulman, et vers l'Asie centrale. Il suffit de lire l'ouvrage du ministre turc des affaires étrangères, Davutoglu, pour comprendre que la Turquie veut renouer avec l'ambition ottomane et que les peuples voisins, ne seront pas autre chose que des puissances satellites s'ils ne prennent pas garde à créer plus d'équilibre dans la région.

Après tout, les hommes politiques turcs n'ont fait que leur travail : ils ont tout fait pour promouvoir l'intérêt de leur nation, alors que les élites de la Grèce et de Chypre, se sont laissées bercer d'illusions, croyant qu'elles pouvaient parvenir à un état de prospérité et de sécurité permanente uniquement grâce à leur appartenance à l'union européenne, rêvant de devenir des "sociétés multiculturelles" et autres obsessions que l'on a vu apparaître dans leur bouche comme s'il s'agissait d'une priorité.

Les élites grecques ont oublié que la politique n'était faite que de rapports de force, et que celui qui par fatalisme ou illusion renonce à combattre ou à défendre les intérêts de son peuple, est tout simplement ignoré ou écrasé. C'est d'autant plus vrai en Méditerranée orientale. La Grèce et Chypre ne se trouveront jamais au Benelux ni dans les Alpes...
















En contrepartie, on a vu Chypre et la Grèce se rapprocher davantage d'Israël (ou plutôt, Israël se rapprocher de la Grèce et de Chypre, palliant l'absence de vision des leaders grecs).

Plusieurs courants, en Israël et en Turquie, veulent renouer avec la vieille alliance israélo-turque. Mais les Israéliens ont compris qu'il existait au moins deux Turquie, de sorte que cette seule alliance n'était pas une garantie et qu'ils ne perdaient rien à diversifier leurs alliances (1).


Aux Grecs de le comprendre : Israël, au-delà de ses intérêts, combat pour sa survie même et agit en conséquence; Israël ne prendra au sérieux la Grèce que si les dirigeants grecs agissent de même.

La Grèce, Chypre et Israël, peuvent constituer un axe fort en Méditerranée orientale s'ils parviennent à surmonter la myopie géo-stratégique et les préjugiés forgés pas les siècles qui les avaient conduits à s'ignorer mutuellement. (2)

Indépendamment du problème turc ou de l'incertitude créée par les printemps arabes, cet axe pourra être une source d'équilibre pour la région, sur tous les plans, et une grande chance pour que l'union européenne se réveille de sa torpeur ou de son rôle de simple mécène, et jouer un rôle central au Proche-Orient.


Sur le plan économique, chacun peut observer la montée en puissance de la Turquie, 13ème économie mondiale; son industrie, grâce aux bas salaires et à la volonté de ses politiques, fournit de l'électroménager et des voitures bon marché pour les grandes marques européennes. Coopératives d'Etat, sociétés privées, sociétés du secteur civil contrôlées par le secteur militaire, aidées par les transferts de technologie et les délocalisations des entreprises occidentales ou les contrats de sous-traitance, toutes se développent et exportent.

La montée en puissance de l'industrie de défense turque se confirme : grâce au fonds de développement de l'industrie de la défense turque, qui dispose d'un budget séparé de celui de l'Etat (et perçoit même un pourcentage des spiritueux achetés par les touristes), la Turquie est devenue un grand exportateur d'armes et vise l'autarcie dans de nombreux domaines.

Jusqu'à présent les Chypriotes grecs considéraient, sans doute à tort que leur prospérité (d'ailleurs mise à mal par la crise) était un atout dans les négociations; aujourd'hui cet argument apparaît très secondaire; outre l'économie mafieuse de la partie occupée, la présence turque à Chypre peut compter sur la nouvelle puissance financière turque.

Quant à la Grèce, seule puissance à ne jamais contester la politique des gouvernements chypriotes successifs, sa faillite, les délocalisations vers la Bulgarie et la Roumanie, bref la ruine de son état et de son appareil productif, n'aideront pas; certes il y a la fraude que l'on présente comme la cause de tous les maux, mais la fraude n'empêchait pas la Grèce de promouvoir une politique industrielle d'exportation, ce qu'elle n'a presque jamais fait; la fraude existe aussi par exemple en Italie, mais Rome pourra toujours compter sur sa puissance industrielle pour sauver ce qui peut l'être; là encore les élites grecques ont fait les mauvais choix, organisant les jeux olympiques sans en avoir les moyens, entrant dans l'euro sans se poser la question du développement de leur industrie, basant tout sur les services, sur du vent... La crise économique et sociale aggrave la crise démographique : les jeunes Grecs fuient le pays à la recherche de travail à un rythme accéléré. Cette situation peut cependant donner aux Grecs la force du désespoir.


notes
___________________

1- Le virage turc n'est peut-être pas si étonnant : si l'on prend en compte la façon dont le monde arabo-musulman, vaste et diversifié, se rapproche de la Turquie et le rêve de celle-ci d'en devenir le leader et le ciment, la Turquie a peut-être moins besoin d'Israël; en tout cas, la Turquie a beaucoup moins besoin d'Israël qu'Israël n'a besoin d'alliés dans la région... Du point de vue industriel la Turquie est surtout gênée par les commandes en cours qu'elle a pu faire auprès d'Israel, par exemple, pour les drones Heron. Mais une fois le problème des commandes en cours réglé, la Turquie pourra se tourner vers de nouveaux partenaires : elle a même déjà commencé à diversifier ses partenariats dans le domaine de l'industrie militaire, avec la Corée du Sud notamment (développement du char Altay, et de l'automoteur Firtina).
Dans une alliance, Chypre mais aussi, en partie, la Grèce (pour ses îles) jouent la carte de leur survie ou de la protection de leur intégrité territoriale, comme Israël; pas la Turquie.


2- Pour ne prendre que deux exemples : d'un point de vue économique, les zones économiques exclusives de la Grèce, de Chypre et d'israël peuvent aller de l'Italie jusqu'au voisinage du canal de Suez sans discontinuité; d'un point de vue militaire, l'espace aérien grec et certaines îles comme la Crète, outre Chypre, peuvent présenter un grand intérêt, offrant de nouvelles bases à l'aviation israélienne, lui permettant une allonge stratégique potentielle jusqu'au Maghreb sans aucune difficulté (comme l'ont fait les forces de l'OTAN en Libye en 2011) outre la possibilité de s'entraîner dans un vaste espace aérien, avec des pilotes grecs reconnus pour leurs compétences. Israël est un Etat aux aguets contraint de parer à toute éventualité sur la longue durée dans un monde en changements. Quant à la situation de Chypre, elle est si fragile qu'Israël peut vite lui devenir indispensable, permettant aux Israéliens de lui demander des contreparties sans limites. De leur côté, Chypre et la Grèce pourraient profiter du savoir-faire israélien en matière militaire et technologique, et apprendre d'Israël en terme d'organisation - organisation de leur réserve ou de leur diaspora notamment.

retour au blog Actu Chypre, l'actualité du conflit de Chypre : http://actuchypre.blogspot.com/


consulter la liste de tous les articles du blog récents et plus anciens, colonne de droite